En 12 années passées désormais à fréquenter l’écosystème des startups de la Baie de San Francisco (histoire d’être géographiquement précis et de ne pas mentionner que la « fameuse Silicon Valley »), j’ai adoré voir de près les monstres du Web (Google fin 2007 ou Linkedin, Facebook dès 2008, eBay, Intel, etc.) mais aussi rencontrer des « anonymes » qui ont disparu depuis (la dure destinée d’une « startup » parfois) et d’une certaine façon « rendre compte » de la réalité du terrain. J’adore ça !
Aujourd’hui, et nous le devons beaucoup aux années Techcrunch, le fameux site d’information américain spécialisé dans l’actualité des startups Internet fondé en 2005 par Michael Arrington, les nouvelles « tech » dans les journaux, tous formats confondus, se contentent trop souvent de faire la part belle aux heureux bénéficiaires de levées de fonds. Genre « t’as pas levé, reviens quand t’auras une belle histoire à raconter ».
Suite à une énième « vidéo live » partagée sur le réseau social professionnel en ligne Linkedin, où j’aime parler en général de l’actualité du jour, j’ai proposé d’écrire une histoire de startup pour qui serait intéressé. Je tiens donc ma promesse à travers cette nouvelle et éphémère rubrique qui va permettre de faire parler ces entrepreneurs de startups de leur projet et de leur histoire à travers un simple jeu de questions et leurs réponses. Avec le tutoiement de rigueur, sans filtre.
Aujourd’hui, c’est Michel Gien qui va nous parler de Twinlife depuis Paris… Bonne lecture !

LJS : C’est quoi ton projet, tu as commencé quand, en solo ou en duo ?
Michel Gien : Notre projet vise à proposer une alternative « éthique » aux services de messagerie instantanée et appels voix/vidéo (WhatsApp, Messenger, Skype, Telegram, Signal, WeChat, etc.) qui « pompent » et analysent les données personnelles de leurs utilisateurs afin de pouvoir les contrôler, à des fins diverses et variés, le plus souvent mercantiles. Le projet a démarré en Mars 2012 avec mon binôme Christian Jacquemot avec qui je travaille depuis 30 ans dans diverses start-ups « DeepTech » internationales (Chorus Systems, VirtualLogix).
LJS : Qu’est ce qui t’a amené à développer ton projet entrepreneurial ?
Michel Gien : Après 30 ans à essayer de vouloir changer le monde par la technologie, dans des start-ups B2B que nous avons co-fondées, nous avons senti le besoin de mettre notre expérience du développement informatique et de la création d’entreprises à ambition internationale au service des « gens auxquels on tient » : nos familles, parents, enfants, amis, avec l’objectif de leur redonner l’intimité de leurs interactions numériques et la liberté qu’Internet et le Web étaient sensés leur fournir et que les GAFAs et assimilés leur subtilisent un peu plus chaque jour.
LJS : Le Pitch ?
Michel Gien : « twinme – private messenger », est une nouvelle génération de messagerie instantanée et appels voix/vidéo sécurisés, conçue pour protéger la vie privée (« Privacy by Design »).
Contrairement aux alternatives (WhatsApp, Messenger, Telegram, Signal, etc.) qui « n’entendent peut-être pas ce qu’on dit » si elles sont chiffrées, mais « voient tout ce qu’on fait » par simple analyse de notre graphe de relations et de nos interactions,
– twinme ne nécessite pas d’inscription : pas de User-ID, pas de numéro de téléphone, pas d’email, aucune information personnelle permettant de nous identifier ou d’identifier nos contacts et donc pas d’espionnage, pas de harcèlement, pas de publicité ou appels non sollicités, pas de spam ;
– tous les échanges chiffrés de bout-en-bout s’effectuent en peer-to-peer, directement de terminal à terminal, sans serveur de distribution intermédiaire donc pas de trace dans le cloud.
LJS : Tu t’adresses à quel marché, quels types de clients ?
Michel Gien : Tout ceux qui utilisent des services de messagerie instantanée et appels voix/vidéo pour interagir avec leurs familles, amis, communautés, collègues, clients, fournisseurs, partenaires, etc. Le service est gratuit pour les utilisateurs individuels. Une version de twinme est exploitée sous licence par le groupe Skyrock sous le nom de « Skred » depuis Novembre 2016. twinme et Skred représentent début 2020 plus de 6 Million d’activations dans le monde et plus de 500 K utilisateurs actifs mensuels.
Une extension « professionnelle » est en cours de développement pour les organisations souhaitant interagir de façon privée avec leurs communautés, sans devoir échanger de numéro de mobile, e-mail ou autre information personnelle, et donc en respectant GDPR et autres CCPA, tout en contrôlant la gestion des membres, des échanges et des flux d’informations.
LJS : C’est quoi ton modèle d’inspiration ?
Michel Gien : Les disruptions qui, en quelques années, rendent obsolètes les leaders du marché. Quelle que soit l’inertie dont ont disposé ces géants à un moment donné, tous à quelques exceptions près ont disparu : AT&T et autres géants des télécom, constructeurs informatiques (sauf IBM). Dans les années 2000, Google à rendu obsolète AltaVista (Digital Equipment), le leader incontesté des moteurs de recherche, en quelques années seulement, du fait d’une meilleure qualité de ses résultats et du bouche à oreille. Il n’y a aucune raison pour que les Goliath actuels ne puissent être disruptés par un David, comme ils l’ont fait eux-mêmes à l’époque où ils démarraient.
LJS : Quelle est cette partie extraordinaire qui te rend fier particulièrement ?
Michel Gien : 1. L’incongruité d’un numéro de téléphone du 19ième siècle utilisé par les géants du numérique comme le matricule de prisonniers à surveiller ;
2. L’internet a été conçu pour permettre à des équipements informatiques d’interagir entre eux de façon décentralisée et pourtant, les communications entre personnes, au travers de leurs appareils mobiles, sont toujours « centralisées » dans le cloud.
Il est possible de faire autrement en revenant aux motivations à l’origine de la création d’Internet, puis du Web. La technologie informatique (plutôt que télécom) le permet. Contribuer à redonner aux citoyens numériques la liberté que certains voudraient leur confisquer nous rend particulièrement fiers !
LJS : C’est quoi l’équipe, comment tu recrutes tes collègues/employés ?
Michel Gien : Nous sommes 8 à l’heure actuelle, 5 sur les développements techniques, dont Christian Jacquemot, le CTO co-fondateur, un ingénieur expérimenté, avec qui on avait travaillé dans une start-up précédente et qui a quitté le grand groupe dans lequel il avait atterri pour nous rejoindre et 3 développeurs free lance à plein temps, qui préfèrent ce mode de collaboration et sont répartis dans diverses villes de France. Un business développeur s’occupant d’innovation et de start-ups pour le compte d’un grand groupe. Un désigner d’applications mobiles, de renommée internationale, à temps partiel. Tous trouvés par bouche à oreille et recommandations personnelles.
LJS : L’objectif ultime c’est quoi ?
Michel Gien : Construire une société pérenne avec un fonctionnement décentralisé permettant une large autonomie aux services rendus localement par des opérateurs sous licence.
LJS : La France ou le reste du monde ?
Michel Gien : Le monde entier bien sûr, en s’appuyant sur nos valeurs Européennes et en essayant de les essaimer à travers le monde.
LJS : 2020, ce sera comment pour toi ?
Michel Gien : Plusieurs 10 aines de Millions d’installations dans le monde, plusieurs millions d’utilisateurs mensuels, la monétisation d’un usage « Premium » et/ou « Pro » validée, permettant de « scaler » l’étape suivante.

Si vous avez manqué les précédents :
C’est l’histoire d’une startup : Lillup
Bravo pour cette messagerie nouvelle génération! Hâte de l’essayer moi même! Anne-Sophie
Enfin une application qui respecte la vie privée de ses utilisateurs.
Quels seront les avantages de l’offre Premium ?
Bravo pour ce projet ambitieux !
Belle application! Bravo