La dernière rubrique organique de l’année (sans doute, mais qui sait) pour vous donner la température de la Silicon Valley (garantie 100% non sous-traitée) et l’occasion de témoigner sur des tendances… à moins que ce soit juste du buzz : à vous de juger !
Lundi : Buffer se met à poil
On n’arrête pas le progrès dans la transparence au sein des startups ! Chose absolument inconcevable en France, où tout le monde se réfugie derrière un écran noir dès qu’il s’agit de partager le montant de ses revenus, une jeune startup basée a San Francisco qui développe des applications pour partager son contenu sur les réseaux sociaux, vient de publier la grille des salaires de l’entreprise, sans exception. C’est nominatif pour certains postes, Joel Gascoigne, le CEO, a du s’inspirer d’un certain Jean-Marc Ayrault qui nous avait fait part d’une belle opération de déclaration des revenus en avril 2013. C’est donc $158,800 pour Joel (composé de son salaire brut et des primes), jusqu’à $45,000 pour un « Hapiness Hero » (dont on ne sait pas vraiment à quoi cela correspond, mais ce n’est pas grave, « parce que ça montre que c’est une startup cool »). Ce qui est interessant, c’est également d’avoir expliqué comment se décompose un salaire : la salaire de base, auquel se rajoute un coefficient multiplicateur en fonction du nombre d’années d’expérience en général et dans l’entreprise, un éventuel bonus lié a son implantation, et enfin un pourcentage du capital de l’entreprise ou un bonus annuel de $10.000. La frilosité française vis à vis de la transparence des salaires m’a toujours amusée, fruit d’un héritage religieux tout comme celui d’une politique de redressement fiscal absolument débile. Ce qui m’amuse encore plus, c’est la transparence des salaires affichée par une startup qui a l’évidence ne fait pas un centime de chiffre d’affaires, et dont la seule levée de fonds pour le moment officielle s’élève à $400.000. Ils sont vraiment versés, tous ces salaires ?!
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Mardi : quand les médias britanniques investiguent la Silicon Valley
En voilà une startup qui a de la chance… créée en mai 2013 au paradis des startups de la Silicon Valley, Palo Alto, par un équipe de vieux routiers du software (le CEO, Jen Christensen, a fait un court passage chez Borland, ça vous parle ?!), Jaunt n’a pas encore vraiment eu le temps de mettre son site web en service qu’ils ont déjà réussi à trouver un premier filon de financement. J’ai dit « filon », car $350K, ça paye guère les cacahuetes pour accompagner l’apéro, pour une société développant une technologie qui capture et restitue du contenu vidéo en 360 degrés… De la part d’un ancien ingénieur venant de Google et de deux ingénieurs qui se sont rencontrés chez Flipboard, on peut imaginer qu’il y a un peu d’huile de coude. Mais ce qui va surement faire la différence pour cette levée, c’est que l’investisseur n’est autre que BSkyB, l’opérateur de télévision par satellite britannique, et ses £7 milliard de chiffre d’affaires, qui constitue a priori une petite avance pour ce qui sera surement un partenariat technologique. Voilà la Silicon Valley, en quelques faits : des ingénieurs expérimentés et un bon pédigrée, une belle idée de technologie avec la niche qui va bien, de préférence dans le domaine des médias et du contenu, qui ne cesse de se chercher, et des géants Européens qui chassent sans se lasser dans une Silicon Valley profonde et pleine de petits trésors à racheter, sans trop se fatiguer.
Mercredi : Pas de Noël pour les geeks
Vous connaissez Rockstar ? Non, ce n’est pas le dernier jeu de Zynga, King.com ou je ne sais qui. Ni la boisson énergétique. C’est une bien meilleure blague : il s’agit d’une société détenant des brevets appartenant conjointement à Apple, Microsoft, Blackberry, et Ericsson. Cette société a été créée lors du rachat d’environ 4.000 brevets à la société Nortel en 2011. A quoi sert ce type de société : à prendre un maximum de profits sur les licences possibles et imaginables, et comme on dit dans certains dialogue de Michel Audiard, « emmerder le monde », comme demander auprès des tribunaux quelques dédommagements de la part de Google (comme par hasard). Cela peut ressembler à une sorte d’entente cordiale parmi certains industriels censés se faire une compétition sans relâche, et les détails de l’antichambre de cette industrie des télécoms ressemble parfois à un gros « bordel ». Toujours est-il que Google, qui ne croit plus au Père Noël depuis bien longtemps a décidé de contre-attaquer en cette période de fêtes… pas de trêve pour les confiseurs. Une bagarre au profit des consommateurs ? Que nenni, un épisode de plus dans la lutte qu’Apple notamment mène contre son voisin de Mountain View.
Jeudi : Google veut prévoir la pluie et faire le beau temps
Le même jour, sur l’un des médias les plus orientés « startups » à la sauce Silicon Valley, on nous explique la profonde et sincère volonté du géant Google de devenir pro-actif et proposer une solution simplifiant la vie au quotidien de ses utilisateurs en rendant les taches plus simples et rapides : au volant, dans votre salon, dans votre poche… et maintenant sur votre nez avec les Google Glass, que j’ai pu essayer récemment. Comment ? A base d’algorithmes et de données. Vos données. Plus, et encore. Surtout, vos données, après les algorithmes. La confidentialité de vos informations, un des débats majeurs de l’année, est perdue depuis belle lurette, et ce dès que vous posez le premier index sur un ordinateur connecté à Internet. Quand à votre smartphone (et que vous le vouliez ou non), avec précédemment la géo-localisation, aujourd’hui le micro-phone (merci la nouvelle version du logiciel de l’iPhone), et demain la caméra de vos lunettes, vous êtes cernés. On peut remercier le Père Snow-den, le Père Noël digital, d’avoir révélé au monde entier ce qui se passe dans l’antichambre des serveurs informatiques depuis belle lurette. Et ce n’est que le début. Le même jour, donc, des jeunes startupers à lunettes appelés Rap Genius, société consacrée à l’interprétation des paroles de chansons et textes en tout genre, se font coincer la bulle internet pour abus d’optimisation et de pointage de liens par Google qui va à coup sûr leur faire perdre des points au palmarès des startups qui veulent faire du chiffre d’affaires. Une année d’Internet résumée dans ces deux faits : définitivement, on est est encore au Digitalithique de l’Internet (en comparant cette ère au Paléolithique de l’espèce humaine).
Vendredi : quand les argentiers de la Silicon Valley vont faire des petits ailleurs
On va encore m’accuser de tropisme de Silicon Valley, mais voici un nouvel épisode qui montre bien que la Silicon Valley est l’endroit où tout se passe en terme de capital risque, même si certains investisseurs ont décidé d’aller voir ailleurs… et pour cause. Deux ex-partenaires de Sequoia Capital, la fameuse compagnie d’investissement basée à Menlo Park sur Sand Hill Road, Mark Kvam et Chris Olsen, viennent de confirmer leur fonds à hauteur de quasiment $225 millions qui seront consacrés à des startup basées dans le Midwest. Pour ceux qui ne connaissent pas leur géographie des États-Unis, le Midwest est lc’est aujourd’hui le grenier à blé des États-Unis, aux exploitations agricoles intensives et performantes, mais aussi le cœur sociologique de l’Amérique rurale, au Nord-Est, qui comprend au total huit États (dont l’Illinois, l’Indiana, l’Iowa, le Michigan, le Minnesota, le Missouri, l’Ohio et le Wisconsin). Mais que diable vont-ils faire dans cette galère, dirait Géronte ? Et bien il semblerait que les entrepreneurs locaux souffrent à trouver les subsides nécessaires au développement de leurs idées, et c’est donc dans l’Ohio que nos amis ont donc trouvé demeure, à Colombus. Ce n’est pas tant l’argent qui semble manquer dans la Silicon Valley, mais plutôt le « sourcing » de projets qui les ait incité à s’exiler aussi loin (ça a tendance à tourner un peu en rond, dans la Silicon Valley, et à chercher à copier le voisin plutôt qu’à innover), avec déjà trois startups en portefeuille, dont l’une (Roadtrippers) a comme CEO Tatiana Parent et qui affiche le latin, le grec ancien, le klingon comme langues professionnelles. Et le français, en très bonne compagnie comme on peut le constater (tout un symbole). 22% de l’économie américaine mérite bien un petit détour, mais je parie que nos deux compères ont un abonnement annuel vers l’aéroport de San Francisco.
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Voilà, c’est fini, à la semaine prochaine pour de nouvelles actualités et aventures !
Mise à jour (4 janvier 2014) :
Le standard de L’Express a été assailli d’appels de la part du Club des Fans de Buffer, scandalisé par mes propos sur « la transparence des salaires affichée par une startup qui a l’évidence ne fait pas un centime de chiffre d’affaires ». « Comment ça ? Ils ne font pas de revenus ? ». Et tout ça, et tout ça. Il est clair qu’en ma qualité de blogger, je m’autorise à dire ce que je veux puisque personne ne me retirera la carte de presse que je n’ai pas. Il est clair également qu’en ma qualité d’intervenant bénévole, je ne passe pas ma vie à contrôler tout ce que l’on peut dire sur Internet, je ne suis pas payé pour ça.
Comme je suis quelqu’un qui écoute les bienveillants spécialistes et lecteurs de tout ce qui se fait dans la startuposphère, et quelque peu consciencieux de ne pas colporter des erreurs, il semble que Buffer soit tout aussi transparent sur ses revenus : $196.000 de chiffre d’affaires en novembre, soit $2.347.000 sur un an, et un peu plus de $310.000 en banque. Voilà, justice a été faite. Merci Big Brothers.