Om Malik, pour ceux qui ne le connaissent pas encore, est un jeune homme de 47 né à New Delhi, désormais citoyen américain, et l’un des sages de la Silicon Valley depuis quelques années déjà. Fondateur du blog consacré aux nouvelles technologies GigaOm, un puissant média de la région, il ést également partenaire du fonds d’investissement True Ventures, qui investit essentiellement dans des startups en phase de démarrage.
C’est désormais le troisième épisode de la conférence Roadmap, organisée par Om Malik et son équipe. Om a la capacité de mettre les grands de cette Silicon Valley en confiance, et de nous gratifier d’échanges de très haut niveau, par sa capacité à examiner chaque sujet très simplement : le cloud, le mobile, le jeu, leurs business modèles, leur écosystème, et ceci loin de tout le brouhaha qui rend parfois un peu surréaliste la banlieue Sud de San Francisco. Mais il sait également amener ces confidences qui font la différence. Et avec Kevin Systrom, ce n’est jamais une déception. Enfin d’habitude.
Kevin Systrom est un de co-fondateurs d’Instagram. Kevin évoque dans l’interview « l’histoire de l’Internet »… Instagram a surtout été l’un des meilleurs coups réussi dans cette courte période qu’est « l’histoire d’Internet » par le rachat d’une startup de 15 personnes développant une application ayant 35 millions d’utilisateurs. Même si au rapport du prix de la transaction ($1 milliard) avec le nombre d’utilisateurs, d’autres entreprises par le passé ont fait bien mieux comme le prouve ce diagramme :
Par contre, quand on regarde le prix par salarié :
Ce diagramme n’a d’autre conclusion de montrer à quel point le 15 salariés de l’époque se sont partagés un vraiment gros gâteau. Ils sont 60 maintenant, et à la grande surprise d’Om, le patron de Kevin Systrom, c’est Mark Zuckerberg. Et ça nous l’a changé, le Kevin, qui se met à nous parler comme le Zuck : « Instagram est une société de communication. Ce ne sont pas des photographies que les utilisateurs publient, ce sont des messages transmis à travers le monde ».
« Nous voulons résoudre les problèmes des gens ». Vous avez déjà entendu parlé comme ça, n’est-ce pas ? Et qu’est ce qui arrive, quand un leader d’Internet se met à parler comme ça ? Et bien ça veut dire qu’il va vous servir de la publicité, ce qui est le cas d’Instagram qui est en train de la mettre en place aux États-Unis. “Most of the ads on the Internet we mostly ignore.” : nous ignorons la publicité en général, nous dit-il. Alors pourquoi en mettre ? Facebook ne fait-il pas le travail suffisamment ? Je pense qu’Om en souhaitant à deux occasions « bonne chance » à Kevin sur ce dossier affichait clairement sinon sa déception du moins un questionnement sur ce sujet. Path, l’autre acteur de la Silicon Valley du partage de photos sur mobile (étrangement Dave Morin était absent de cet épisode de Roadmap alors que sa startup est une cliente idéal pour cet évènement), ne sait pas non plus se « dépatouiller » sur les moyens de faire de l’argent avec ses utilisateurs. Hormis vous faire acheter des émoticons en 3D ou vous évitez d’en avoir, de la pub. Et lui n’a pas Facebook derrière lui.
C’est fou comme ces brillants entrepreneurs de la Silicon Valley manquent d’inspirations quand il s’agit de faire rentrer de l’argent dans la maison. C’est pour cette raison qu’ils sont tous dans le numéro du serpent et la course au chiffre pour se faire racheter par plus gros et plus riche que soit. C’est bien dommage pour Internet que peu de gens arrivent à tirer en dehors de cette sphère « bullesque » qui n’a pas beaucoup changé depuis les années 2000.
Bien que Kevin nous parle toujours d’Instagram comme une entité indépendante au sein de Facebook, avec 60 personnes, l’essentiel du management de l’équipe vient de Facebook, donc il faudra bien s’attendre un de ces jours à un fusion définitive d’Instagram au sein de Facebook… Certainement une histoire d’écritures comptables, car il faut bien prouver dans les chiffres la permanence de la valeur du prix d’acquisition dans les comptes de Facebook, qui ne peut pas se permettre une quelconque variation de sa valeur en bourse, alors que la situation a plutôt bien été redressée à ce sujet.
Je pense ne pas avoir été le seul déçu par les réponses de Kevin Systrom sur ce qui va suivre pour Instagram, et ce n’était pas nécessairement lié à une baisse de forme de Kevin. Mais simplement, à l’exemple de la mise en place de la possibilité de poster des vidéos sur Instagram, le réseau social ne fait simplement plus tant le buzz, hormis le fait d’avoir une belle base installée qui continue sa route, pleines de « selfies » et autres « bouffies ». Et encore, vous n’avez pas vu Frontback, c’est pire que Barnum la-dedans.
Là ou je trouve que Kevin a raison, et pas uniquement pour Instagram : « Proximity and Location are the next opportunities ». La clé du succès notamment pour les applications mobiles, mais également les sites web associés, se trouve dans les moyens mis en oeuvre pour solliciter la proximités et tout ce qui est local. La monétisation, elle est quelque part par là ! J’ai cru rêver sino m’étrangler en entendant : “Don’t just think about data and how it benefits the company. Think about how it benefits the consumer.”. Je suis curieux de voir ce qu’Instagram pourra proposer à ses utilisateurs pour apporter le bénéfice de la données à l’utilisateur (un peu à l’exemple de Ness et son « machine learning ». Un éclair de lumière dans une interview trop teintée de « BS training », je suis désolé de le dire.