Les enjeux de la « Silver Economy »

La « Silver Economy », quoi qu’apparemment une notion anglaise, n’est en fait majoritairement utilisée que par les Français, et par conséquent il serait plus correct de parler de « Senior Economy », mais peu importe. Il s’agit du secteur dédiée aux personnes âgées dans nos sociétés. Le processus de vieillissement de la population est réel et influence tous les marchés et les industries, tels que l’habitat, le transport, l’agro-alimentaire, les assurances, la robotique, la santé et e-santé, la communication, l’e-commerce, les loisirs …

Des entreprise sur ces marchés travaillent déjà à l’adaptation de leur offre au processus de vieillissement. Le vieillissement de la population intervient naturellement dans la plupart des pays du monde, et au cours des prochaines décennies, la part de la population mondiale âgée de 60 ans ou plus devrait atteindre des niveaux historiques sans précédent.

Selon les dernières estimations, d’ici 2050, il y aura 2 milliards de personnes de plus de 60 ans (22% de la population mondiale). En 2050, la population mondiale devrait être 3,6 fois plus importante qu’en 1950. Les gouvernements et les acteurs industriels imaginent de nouvelles politiques et de nouveaux produits pour répondre aux besoins de la population vieillissante.

La « Silver Economy » dans la perspective de vente au détail

Aux États-Unis, Best Buy fait du chiffre d’affaires avec des téléviseurs et des ordinateurs pour vendre des produits de surveillance à domicile qui s’occupent des personnes âgées. Par exemple, le détaillant de produits électroniques vend un programme d’installation de résidences-services appelé « Assured Living » au coût de 389,96 $ (l’installation coûte 199 $ de plus) dans certains magasins. Son CEO, Hubert Joly, envisage de lancer une initiative commerciale plus vaste de services à base de capteurs, vendus par l’intermédiaire de services de santé dans plus de 1.000 magasins Best Buy. Pour vous donner une idée du potentiel du marché : d’ici 2020, environ 45 millions d’Américains s’occuperont de 117 millions d’aînés.

Best Buy est pour le moment l’une des entreprises les plus actives dans la compétition pour un marché de 50 milliards de dollars destiné aux personnes âgées. Hubert Joly l’appelle « un espace blanc en attente d’être capturé ». Google, Microsoft et Samsung s’attaquent également au marché de la maison intelligente avec des produits tels que des caméras de sécurité et des thermostats pouvant être gérés par des contrôleurs vocaux ou des smartphones. Amazon a déjà lancé un programme d’installation de maisons intelligentes dans plusieurs villes de la côte Ouest. Tous ces systèmes pourraient facilement être adaptés pour garder un œil sur les personnes âgées.

À Denver, Best Buy s’est associée à l’assureur UnitedHealth pour proposer des séances de coaching sur le mieux-être par des diététiciens et des physiologistes au coût de 59 $ par mois. Ce prix comprend l’installation, plus une station pour la collecte de données, mais le reste du matériel est vendu séparément et coûte généralement quelques centaines de dollars par foyer. Ce n’est pas bon marché, mais c’est beaucoup moins que les 3.500 $ par mois que peuvent coûter d’autres programmes sur ce marché. Il n’y a pas suffisamment d’établissements de soins de longue durée pour prendre en soin toute la population âgées, et 90% d’entre eux veulent rester à la maison. Pour que les consommateurs plus âgés soient à l’aise lorsqu’ils achètent la solution, Best Buy utilise une équipe de vente spécialement formée pour conseiller les acheteurs potentiels sur ce qu’il faut acheter, tandis que l’installation est prise en charge par son équipe de support technique Geek Squad.

Au fur et à mesure que Best Buy progresse, il pourrait se retrouver en concurrence avec des entreprises qui vendent déjà des produits gériatriques dans les magasins Best Buy, signe que les soins aux personnes âgées deviennent finalement intéressants à traiter. Mais l’entrée de sociétés ayant une base marketing déjà établie aidera tous les acteurs puisque ce marché a connu une croissance lente jusqu’à présent en raison d’un manque de marques grand public dans cet espace.

En France, Vivadia est un pionnier dans la vente en ligne de produits spécialisés, désireux de devenir le centre commercial de référence de la « Silver Economy » en France. Un catalogue de 20.000 références de qualité, incluant des actualités, des guides pratiques, des conseils professionnels, sont proposés pour attirer et séduire, chaque jour, de nouveaux adeptes. Afin de devenir la première destination shopping des seniors, la galerie marchande de Vivadia est composée de 7 sites marchands spécialisés et de 28 sites marchands co-brandés, offrant le catalogue exclusif de marques réputées dans cette catégorie. Vivadia a été acquise par Damartex Group, le propriétaire de la marque Damart en mai 2017.

Les nouveaux types d’investisseurs dans la « Silver Economy »

Un signal positif pour une nouvelle économie est lorsque les investisseurs commencent à se concentrer sur un marché dédié. La biotechnologie et les sciences de la vie sont une affaire de spécialistes et nous avons assisté récemment à l’apparition d’une nouvelle génération d’investisseurs avec une grande connaissance dans ce domaine très technique, qui était plus dans le passé pris en charge par les compagnies pharmaceutiques. Ces nouveaux acteurs interviennent comme denouveaux influençeurs dans le domaine des soins et de la santé afin de stimuler une nouvelle économie.

Breakout Labs est l’un d’entre eux. Cette organisation investit dans des domaine proche de la recherche scientifique fondamentale qui est trop spéculative ou à trop long terme pour intéresser les investisseurs providentiels et les capital-risqueurs, mais qui n’est pas compatible aux sources traditionnelles de financement de la recherche scientifique. Breakout Labs opère dans le cadre de la Thiel Fondation, une organisation philanthropique créée par Peter Thiel, co-fondateur de Paypal et maintenant l’un des plus grands investisseurs individuels dans le domaine des technologies. Les investigations de Breakout Labs sur ce segment sont relativement larges, mais aussi plus axées sur la thérapeutique, et les investissements effectués dans ce domaine sont très intéressants à analyser.

Cortexyme, basé dans la région de la baie de San Francisco, développe des produits thérapeutiques pour modifier le cours de la maladie d’Alzheimer et d’autres troubles du vieillissement en ciblant un pathogène spécifique lié à la neuro-dégénérescence. La maladie d’Alzheimer affecte plus de cinq millions de personnes aux États-Unis. La société a levé 24 millions de dollars à ce jour, et travaille constamment sur le développement de nouvelles thérapeutiques et de nouveaux diagnostics, parallèlement à ces grandes sociétés pharmaceutiques vendant des milliards de pilules. Pfizer et Takeda Pharmaceutical Company font partie des investisseurs de la startup créée en 2012.

Fondée en 2010, Longevity Biotech, une société basée à Philadelphie qui a levé $840.000 à ce jour, développe une nouvelle classe de produits thérapeutiques via la technologie des protéines artificielles. La société développe de nouveaux médicaments thérapeutiques grâce à des molécules de type biologique qui sont hautement résistantes à la dégradation par les enzymes digestives naturelles et adaptables à des structures moléculaires très stables, qui peuvent avoir des impacts cliniques directs sur la vie des patients.

Laura Deming est une scientifique américaine âgée de 24 ans. Elle et son frère ont été scolarisés à la maison. À l’âge de 8 ans, Laura s’est intéressée à la biologie du vieillissement et, à 12 ans, elle a rejoint un laboratoire de l’Université de Californie à San Francisco. Elle a été acceptée au MIT à l’âge de 14 ans, mais a ensuite abandonné pour prendre la fameuse bourse de $100.000 de la Thiel Foundation. Elle est maintenant partenaire et fondatrice de The Longevity Fund, une société de capital de risque axée sur le vieillissement et l’extension de la vie. Le Longevity Fund recherche des startups testant l’hypothèse que le vieillissement peut être modifié par des choses uniques, des cibles spécifiques, de petites molécules ou des produits biologiques, en développant de nouvelles technologies pour manipuler les systèmes biologiques.

Deming croit que la science peut être utilisée pour créer l’immortalité biologique chez les humains, et a dit que mettre fin au vieillissement « est beaucoup plus proche que vous ne le pensez ».

Les startups de la « Silver Economy »

La perspective d’un marché gériatrique en plein essor a donné naissance à un nombre important de startups financées par du capital-risque offrant divers types de services technologiques. Personne n’a encore créé un grand succès sur ce marché et beaucoup ont échoué.

Un exemple est Lively, un service senior de surveillance à domicile soutenu par une société de capital-risque co-fondée par le président exécutif de Starbucks, Howard Schultz, dirigée par des vétérans d’Apple et eBay. La startup a essayé de développer trop rapidement la vente directe aux consommateurs, par le biais de partenaires industriels établis. La société n’avait pas d’autres solutions que d’être acquise l’année dernière par GreatCall, un fabricant de dispositifs adaptés aux personnes âgées, basé à San Diego. La Silver Economy est une source d’inspiration pour les entrepreneurs de startups dans le monde entier qui se penchent sur les cas d’utilisation multiples des routines quotidiennes des personnes âgées.

Au Royaume-Uni, Breezie fournit des tablettes avec des systèmes d’exploitation simplifiés pour aider les personnes âgées à accéder aux services en ligne. Créé en 2011, avec un financement total de 7,5 millions de dollars, Breezie vend un logiciel intuitif personnalisé qui convertit les tablettes Android en une expérience simplifiée, et supprime l’encombrement et le jargon des applications des services populaires (comme Facebook, Google, Skype, etc. ). Une récente collaboration aux États-Unis avec T-Mobile, le premier fournisseur américain de téléphonie, permettra à Breezie de se lancer plus rapidement sur le marché et de mettre en œuvre des services connectés plus riches.

Venant d’Israël, Easy to Connect (E2C), créé en 2012 (1,3 million de dollars d’investissements levés à ce jour), est axé sur le développement de solutions de communication pour les seniors, améliorant leur vie quotidienne en créant un espace dédié, protégé, avec un environnement technologique cohérent et simple qui correspond le mieux à leurs capacités. Les personnes âgées ont un grand besoin de communiquer avec leurs amis et leur famille. Alors que la jeune génération partage facilement tout avec tout le monde, ceux qui en ont le plus besoin sont laissés pour compte. Dans de nombreux cas, les dernières technologies de communication tactile standard dépassent les capacités des personnes âgées (en raison de problèmes physiques ou de produits trop compliqués). Cet environnement leur permet de bénéficier pleinement des dernières technologies de communication, notamment les Smartphones, les tablettes, la smart TV, les smart watches, etc.

Depuis New York, Hometeam (financement total de 43,5 millions de dollars) a été fondée en 2014 avec la vision de construire un monde où tous les aides-soignants sont visibles, reconnus et habilités, Offrant des soins et un soutien exceptionnels aux familles. Cela consiste à ré-imaginer comment les aidants professionnels sont formés, soutenus et connectés. Ce qui importe dans de nombreux cas est de savoir comment transformer la façon dont les gens vieillissent dans le confort de leur foyer en introduisant des innovations technologiques en partenariat avec nos soignants. Honor, une startup de San Francisco ayant levé 62 millions de dollars, fait le même travail depuis 2014.

À Moscou, Knopka Zhizni (Life Button en anglais), fondé en 2010 avec un financement total de 1,8 millions de dollars, a développé un système médical qui envoie des signaux lorsque les personnes âgées, handicapées et même les enfants ont besoin d’aide. Une personne âgée peut donc déclencher une alarme en appuyant sur le bouton. Et dans des situations dangereuses, par exemple, en tombant, le signal disparaît automatiquement. L’appel arrive au centre d’appel où les médecins sont en service, qui ensuite tentent d’atteindre le client ou les voisins, de l’aviser au téléphone ou d’appeler une ambulance. Le gadget lui-même ressemble à un téléphone avec un bouton SOS ou un bracelet avec un capteur de chute.

Depuis les Pays-Bas, Tinybots (créé en 2015) a développé un petit robot social appelé Tessa qui aide les personnes âgées atteintes de démence en leur fournissant des rappels systématiques, de la musique personnalisée, des contes, une thérapie cognitive et des instructions vocales pour les tâches quotidiennes. En utilisant une application, les soignants peuvent configurer un Tinybot pour les besoins et des souhaits personnels. Le robot Tessa ne ressemble pas à une machine, mais ne ressemble pas non plus à un animal en peluche : grâce à sa structure construite en bois, il s’intègre parfaitement entre vases et autres bibelots dans un intérieur moyen. A intervalles réguliers Tessa parle à sa colocataire, puis propose de jouer de la musique, ou de prendre une bouffée d’air frais. Le robot « entend » après une longue période de silence qu’il est temps d’entrer en action, et peut également être programmé avec une application par un membre de la famille ou un aide-soignant. Il peut annoncer son arrivée, afin que l’utilisateur de Tessa puisse s’y préparer. Même si Tessa répond à des questions simples et s’adapte à sa colocataire, ce n’est pas un chatbot. Cela semble simple, mais Tessa s’appuie sur des années de recherche sur la conception et les fonctionnalités dont les aide-soignants et les patients ont vraiment besoin.

De retour à San Francisco, Stitch, fondée en 2015 avec un investissement de total de $150.000, est un lieu de rencontre pour les personnes âgées. Ils ont développé une application conviviale qui modélise le flux de travail des fournisseurs de soins médicaux et présente les données sur la santé des patients dans le contexte des discussions de groupe, de la messagerie directe, des groupes privés et des forums de discussion. C’est un système de santé envisagé comme une plate-forme où toutes les personnes impliquées (les seniors, la famille et l’équipe médicale) forment un réseau partageant la même plate-forme et les mêmes données, l’ambition étant de devenir la plateforme universelle de la communication médicale demain.

La Silver Economy, ou Senior Economy, est au tout début de sa phase d’investissement avec l’apparition de nouveaux acteurs envisageant l’avenir de la recherche fondamentale comme inspirée par la volonté de changer le destin d’une société confrontée au vieillissement de la population mondiale. Cette industrie est toujours financée en majorité par des investissements privés et non par un business model provenant du Retail ou d’un marché grand public.

La Chine montre souvent la voie: une Chine vieillissante a accéléré la montée d’une telle économie. Selon le ministère des Affaires Civiles, le nombre de citoyens âgés de 60 ans et plus a atteint 230 millions en 2016, soit 16,7% de la population chinoise. Le chiffre atteindra 480 millions d’ici 2050. Cela signifie qu’un quart des personnes âgées dans le monde sera chinois. Le nombre de personnes âgées souffrant de maladies séniles et chroniques augmente, ce qui crée un besoin important de dispositifs d’aide à la réadaptation, de produits de soins de santé et de services de soins infirmiers intelligents en gériatrie.

On estime que la puissance de consommation de l’industrie des services parvenue à maturité en Chine passera de 0,6 billion de dollars à 106 000 milliards de dollars en 2050, soit 33% du PIB total. Alors que le monde entier est en train de devenir numérique, de plus en plus de seniors ont acquis de nouvelles compétences, en particulier le paiement en ligne. Alipay, le service de paiement mobile d’Alibaba, envisage que le nombre de ses utilisateurs âgés de plus de 55 ans aura atteint plus de 10 millions. La société prévoit que les paiements en ligne, les transferts en ligne et les paiements hors ligne utilisant l’application sont parmi les plus populaires de ses services utilisés par les personnes âgées. La Chine compte aujourd’hui environ 60.000 établissements d’enseignement pour personnes âgées comptant plus de 7 millions d’étudiants. Selon le plan de développement de la Chine pour les personnes âgées (2016–2020), chaque ville devrait avoir au moins une université pour personnes âgées, 50% des villes doivent créer de telles écoles, et 30% des villages devraient avoir des centres d’apprentissage âgés d’ici 2020. La Silver Economy en Chine offre des perspectives prometteuses pour le secteur des services. C’est juste un début !

Chronique New-Yorkaise

Fatigué de ses histoires sans queues ni têtes dans la Silicon Valley, j’ai trouvé sympathique de faire une petite pause New Yorkaise dans ces chroniques qui ont parfois bien du mal à se réveiller. Et de partager une drôle d’idée : j’imaginais Spotify annoncer prochainement ouvrir une boutique à New York.

Union Square Shopping

Jeudi 17 Août 2017. Comme à son habitude en cette période, New York est chaud, et humide. Une grosse averse vient de tomber sur la ville, créant des rivières de boue se déversant autour du Washington Square Park. Assis à la terrasse de la Maison Kayser, une boulangerie aux accents Français, sur Broadway, à un bloc de Union Square, les responsables du magasin discute du trafic du magasin, des habitudes du quartier. Assis avec mon chocolat et une baguette viennoise aux pépites de chocolat, j’écoute la rue.

C’est une banque qui a pignon sur rue en face, dans un immeuble de couleur aluminium. Avant juin 2009, c’était un Virgin Megastore. Ouvert en 2006, fermé 3 ans plus tard, ce magasin eut l’honneur d’être la plus grosse boutique de vente de musique dans Manhattan. De la dimension de celui que l’on a connu avenue des Champs Élysées, le Megastore a certainement rendu la mariée belle lors de la vente de la marque Virgin en 2007.

Boutique Amoeba à Los Angeles

Cette fermeture, c’était un des signaux d’une industrie de la musique qui allait devenir quelque peu moribonde dans le monde physique, où aujourd’hui seules certaines enseignes et leurs magasins résistent. Elles résistent soit en s’étant spécialisées, soit en réduisant la voilure, soit en se diversifiant encore plus. Ainsi, la FNAC en France par exemple a ajouté encore plus de catégories de produits d’équipements de la maison, jusqu’à fusionner avec Darty. Pour en revenir aux États-Unis, à part lorsqu’on se promène chez Amoeba à San Francisco ou à Los Angeles, par exemple, avec la renaissance du vinyl, qui est d’ailleurs une bien belle arnaque (je parle des 33 tours à $25), et avec cette ambiance spéciale du groove local, les parcours d’achats de musique dans un Target ou un Best Buy ressemblent vraiment à une opération liquidation permanente.

On le pressentait bien à cette époque en Europe chez les spécialistes de l’industrie musicale et des labels, bien avant le lancement de l’iPhone en 2007 qui allait rendre la musique encore plus près d’un clic d’achat sur votre téléphone portable : la consommation de musique deviendrait numérique. C’en était fini des jeux des industriels obstiné à vendre l’innovation avec de nouveaux formats physiques, plus grands en capacité de stockage, mais incapables de lutter contre des débits des réseaux opérateurs qui passèrent à la vitesse supérieure sous la pression de la concurrence dans ce secteur.

Sans chercher à être exhaustif ici avec les différentes plateformes qui allaient marquer l’histoire de la musique numérique, Pandora Radio allait ouvrir la voie en 2000 avec son service automatisé de recommandation musicale poussé par un Music Genome Project. Derrière ce nom de code magique, un moteur d’intelligence artificielle. Ces deux lettres capitale « AI » ne faisait pas encore briller les yeux des investisseurs, les fameux VCs de startups, toujours à la recherche de ce qui peut se rentabiliser grâce aux lignes de codes : mais c’est la preuve de la désuétude de cette mode.

Et puis Spotify. La Suède, pays d’origine de la startup, créée huit années plus tard, a gagné la course des plateformes numériques d’écoute musicale, même si le siège est aujourd’hui à New York. C’est à Spotify que je pensais, là assis, en écoutant parler de la période où Virgin aider à rendre la musique accessible, dans un univers physique à rendre la FNAC complètement ringarde (je n’ai malheureusement connu que le magasin Parisien).

Spotify, c’est toute la musique que tu veux ou presque, gratuit avec de la pub, ou sans pub mais avec un abonnement forfaitaire. Spotify, c’est une victime de l’arnaque d’Internet dans sa version « cloud » : plus des gens se servent de sa plateforme, plus l’entreprise a besoin de serveurs qui coûtent de l’argent, encore plus d’argent. La boucle exponentielle infernale : 140 millions d’utilisateurs à travers le monde, 60 millions de clients payants, un chiffre d’affaires à presque 3 milliards de dollars, $600 millions de perte en 2016.

Et si le Retail venait au secours de Spotify ?

Fermes de serveurs dans l’espace

Alors qu’il y a toujours des petits malins pour s’imaginer calife à la place du calife aux États-Unis, comme Tidal récemment, ou Napster, il y a du gros en face avec Apple Music, Google Play Music, Amazon Music Unlimited. Spotify se doit de trouver des solutions de croissance pour affronter la concurrence, pour attirer les « zannonceurs » (le plat favori des médias tech du petit web Français, vous savez) parce que la pub fait encore vivre de nos jours. Envoyer des serveurs de stockage informatique dans l’espace, avec des meilleurs coûts et de meilleurs débit, pour améliorer sa rentabilité ? C’est en cours de construction, ça ne vas pas arriver demain. Que reste-t-il ?

La première solution, c’est l’Uberisation. Et là je propose une nouvelle définition du verbe, qui me paraît s’imposer étant donné les déboires de l’ex-startup de Kalanick, le Robin des Bois qui voulait sauver la population des méchants taxis de la terre, et qui s’est pris les pieds dans le tapis de l’arrogance technologique et d’une certaine forme de cavalerie (la fuite en avant). Uberiser aujourd’hui, c’est fonder son principe de croissance sur des cycles d’investissement sans fin, en espérant que quelque chose viendra sauver le bateau face à une rentabilité quasiment impossible à trouver. Bon, Spotify, ce sont des Suédois, des vikings. Ça ne rigole pas tous les jours, mais ça ne prend pas ses vessies pour des lanternes.

Pop-up Store en Suède

C’est là que j’ai eu l’idée du scoop de l’été : Spotify va ouvrir son premier magasin, ici, à New York, à quelque pas de leur siège dans le quartier du Flatiron. Bon, ce n’est surement pas la première fois que Spotify doit réfléchir à tâter au brick and mortar. Personnellement, je trouve que c’est un très bonne idée. Naturellement.

Alors que le monde du Retail traditionnel ne cesse de s’interroger sur son avenir, sa taille, et la température du jour d’Amazon, les petits jeunes players du e-commerce ont commencé une grande farandole de création de magasin : Bonobos, Birchbox (et sa boutique à Paris), Casper, Warby Parker. Il est évident que personne n’a intérêt à voir le centre ville se vider, ça dévalue le mètre carré, c’est mauvais pour les affaires. Regardez par exemple la Station F dans le Sud Est Parisien dont tout le monde parle en ce moment, le paradis des startups. Il fallait bien se dévouer pour permettre à l’indice immobilier du quartier de se refaire une santé. On n’avait pas pensé mieux depuis qu’un homme politique avait voulu se faire construire une bibliothèque à son nom.

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Le Retail new look a la côte. Alors pourquoi par un remake du Megastore à la sauce Suédoise, pour vendre des abonnements Spotify dans des kiosques d’écoute de musique, où l’on pourrait commander le merchandising que l’on trouve de plus en plus aux côtés des descriptions des artistes :  achats d’albums physiques personnalisés, Tshirts et mugs à gogo.

Pourquoi pas mettre en place des scènes de concert interactives, retranscrites en réalité augmentée partout dans la monde, où tous les artistes délaissés et ignorés par les distribution de revenus de Spotify pourrait venir se faire connaître sur une scène alternative. Pourquoi ne pas concurrencer des sites de ventes de spectacles, et là je pense en particulier à StubHub, qui est une autre belle dans la monde du web où bon nombre de concerts se font hackés par des pros du systèmes D qui s’approprient les places des meilleurs concerts. Et vous vous retrouvez avec des prix de ticket et des frais additionnels astronomiques.

La musique est faite pour se partager dans la vraie vie, et franchement un endroit dédié à la musique avec tout ce que les services innovants pourraient apporter : ça manque dans notre espace de vie. Souhaitons donc que l’Amérique soit encore à l’initiative d’un nouveau mouvement, et dans le domaine de la musique, c’est sur Spotify que je parie.